Date: Tue, 1 Jul 2014 17:43:03 +0100 From: Adelard Dore Subject: Big Apple 18 Big Apple 18 Note: Nifty nous offre l'occasion de vivre de belles émotions grâce à toutes les histoires qui y sont racontées. Une contribution serait donc appréciée pour permettre à Nifty de poursuivre cette merveilleuse aventure. Envoyer un don à : http://donate.nifty.org/donate.html « Tu me tues, tu me fais du bien » (Réplique dans le film d'Hiroshima, mon amour) Les mois qui suivirent son initiation furent pour Mark une véritable Lune de miel. Presque tous les jours, et parfois deux et même trois fois par jour, un frère du Club sonnait chez lui et lui demandait un «coup de main» ou de «bouche» ou de «cul» pour satisfaire un besoin identifié comme urgent et dont il relevait de l'ordre moral du Club d'y obtempérer. Parmi les membres du Club qui venaient lui demander des services, il y avait bien sûr, Ricardo, Rico, Felipe et José qui amenaient avec eux parfois Luis, un non-membre, une sorte de mascotte de la compagnie. Mark se croyait populaire et ne voyait pas l'espèce de mépris qu'il y avait à être choisi si fréquemment. S'il avait mené sa petite enquête, il se serait aperçu que, plus il était sollicité, moins les autres l'étaient...et moins les autres l'étaient, plus ces `autres' devenaient solliciteurs faute d'être sollicités. Ce jugement un peu complexe vise à démontrer que les Portoricains, malgré leur adhésion au Club et les serments prononcés, gardaient toujours en eux, comme une sorte de monolithe précieux du machisme, la presque certitude qu'ils agissaient mal en ayant du sexe avec d'autres hommes. Ils regrettaient tous un peu d'avoir été initiés au Club. Alors, comme il y avait, par hasard, un Blanc au Club...et que tout le monde sait que les Blancs sont tous un peu des dégénérés (Humm!), vieil atavisme persistant de l'époque de l'esclavage, se servir d'un Blanc pour soulager sa pression sexuelle, ce n'était pas considéré vraiment avoir du sexe avec un homme. En fait, le Blanc n'est peut-être même pas tout à fait un homme, à leurs yeux. Après tout, en poussant leur logique douteuse jusqu'au bout, ils arrivaient à croire que Mark était peut-être le seul vrai homosexuel du Club. Les Portoricains ne participaient à ce Club que pour soulager leurs insatiables besoins. Le réceptacle de tous leurs besoins ne pouvait être qu'une sorte de « femme » après tout, une pute de service. C'est pourquoi l'augmentation de la popularité de Mark était proportionnelle au mépris qu'on développait pour lui. Lui croyait le contraire. Les murs de son paradis étaient tapissés de scènes d'enfer et il ne voyait que verdure, soleil, matins clairs et beaux jeunes mâles sexés qu'il pouvait couvrir de baisers et soulager de la pression sans cesse renouvelée dans leurs couilles. Avec la diminution de l'admiration allait de pair la diminution de la protection. Il y avait là une double conséquence. D'une part, chacun sentait que, si un jour les choses tournaient mal avec les trop jeunes initiés, ils pourraient toujours tenter de faire porter la responsabilité de cette pratique sur le dos de Mark. C'est lui qui avait initié Rico et Ricardo, après tout. Il était à l'origine de tout cela. Eux, les frères de Ricardo, ils fréquentaient le Latin Jerk off Club auparavant, un lieu où on n'acceptait pas les mineurs. C'est Mark qui leur avait indirectement insufflé l'idée d'une autre sorte de Club avec des plus jeunes mêlés aux plus vieux. Ils ne diraient jamais qu'ils avaient imaginé tout cela pour satisfaire leurs propres désirs homosexuels. Jamais! Ils ne le diraient jamais! Mark était donc ainsi moins protégé que les membres Portoricains du Club. D'autre part, ils se souciaient de moins en moins des conséquences terribles que cela aurait pour Mark s'ils ne cessaient pas de lui présenter de très jeunes garçons. Il était la pute de service. Autant que Mark était bon et utile pour eux-mêmes, autant il pouvait être bon pour les jouvenceaux, pour ceux qui ne trouvaient pas encore de trou de fille et qui avaient besoin de se les vider de temps en temps tout de même. Aussi servait-il à les déculpabiliser lorsque, par hasard encore une fois, ils se retrouvaient chez Mark en même temps qu'un très jeune ou qu'ils l'amenaient avec eux. Ils ne pouvaient quand même pas partir sans avoir profité un peu de ce qu'ils avaient amené avec eux. Tout en se déculpabilisant encore une fois, ils plaçaient Mark dans une position extrêmement dangereuse si la police avait vent de ces partouses. Ils le protégeaient donc de moins en moins en l'exposant et en le compromettant toujours davantage. Au-delà de toute cette rhétorique, Mark nageait dans le parfait bonheur. Les rêves impossibles de toute sa vie devenaient une réalité. Il ne couchait pas avec un, ni deux, ni trois beaux Portoricains, mais avec des dizaines, et certains très jeunes, et cela tous les jours, et parfois plusieurs fois par jour, comme je l'ai déjà mentionné. Une autre caractéristique de l'opinion que les Noirs et les Portoricains se faisaient des Blancs, et cela aussi était un atavisme qui remontait au temps de l'esclavage, c'est que les Blancs étaient des traîtres. Ils donnaient toujours priorité à leurs intérêts personnels au détriment de toute parole donnée et de toute entente collective. Les ententes c'était bon seulement quand cela leur rapportait. Dès que leurs bénéfices diminuaient, les Blancs ne se gênaient guère pour trahir. Hélas! L'histoire leur donne raison et corrobore souvent avec éclats, cette assez juste perception des Noirs envers les Blancs. Il faut ajouter également que la manipulation de Luis par Mark n'aidait pas, malgré la punition exemplaire qu'il avait reçue lors de son initiation, à infirmer cette perception, bien au contraire. Tout cela contribua sans doute, plus ou moins consciemment, plus ou moins volontairement et sans que cela ne soit aucunement concerté ni préparé d'aucune façon, à la déchéance dans laquelle Mark allait s'enfoncer au cours des semaines suivantes. Au milieu de la vie idyllique qu'il menait dans les Champs Élysées de ses jouissances sexuelles portoricaines, Mark ne vit pas le filet qu'il dressait lui-même et dans lequel il allait bientôt se retrouver, l'âme toute emmaillotée comme dans une camisole de force. Parmi les nombreuses visites qui se présentaient à sa porte, Luis était de loin la plus originale, la plus attendue, la plus sexuellement puissante mais aussi la plus physiquement éprouvante et la plus moralement avilissante. Le garçon avait été enchanté (voir le mot dans son sens premier : être sous l'emprise d'un enchantement, d'un sortilège) par la soirée d'initiation chez les frères de Ricardo. Le rôle de dominant qu'il avait joué, la supériorité physique, et sexuellement cristallisée de cette supériorité sur Mark, avait été pour lui une véritable révélation. Il y voyait sa vocation, son plaisir, son originalité, presque sa raison d'être. Il était donc bien naturel qu'il voulut qu'elle se répétât. Comme il ne pouvait pas refaire l'initiation de Mark et comme il avait justement senti que Mark avait été aussi étrangement extrêmement excité par sa performance en short et casquette de cuir noir tout autant que par la violence de ses gestes, il vint le voir de plus en plus souvent, toujours vêtu de ses attributs de cuir. Il exigeait ou planifiait des activités toujours plus compromettantes, toujours plus humiliantes pour Mark, et toujours plus gratifiantes pour lui le dominateur. Il s'était convaincu que son corps et toutes les humeurs que ce dernier produisait devaient être honorés, voire adorés. Mark était sans doute la seule personne qui pouvait aller loin dans l'adoration de ses attributs et de ses sécrétions. Ses camarades Portoricains l'eussent remis à sa place. Et surtout les plus vieux. Pas question de les diminuer ou de les avilir. Luis avait compris que Mark avait pris plaisir à être humilié par lui et qu'il en demanderait encore et encore...Il allait donc lui en donner. Il s'arrangea pour se présenter chez Mark aux moments où il savait qu'il avait peu de chance de rencontrer d'autres camarades du Club. Il arrivait vêtu de son short de cuir qu'il portait sous son froc et coiffé de sa casquette de cuir à laquelle il avait ajouté, trouvée dans une boutique « sautée » de Bleeker Street dans Greenwich, une tête de mort sur fond de croix gammée. Il se présentait donc comme son tortionnaire. Au cours des premières rencontres, il se contenta de lui rougir les fesses avec ses mains, de le forcer à lui lécher le cul, pas toujours très propre (c'était volontaire), de lui nettoyer la bite du fromage accumulé, de lécher ses pieds volontairement chaussés dans des baskets sans chaussettes pour qu'ils puent davantage...etcetera...etcetera... Puis, après la baise, il l'invitait à s'allonger dans la baignoire pour lui pisser dessus. Il lui ordonnait d'ouvrir grand la bouche et de boire le plus possible de son urine. S'il en laissait trop échappé, il le corrigeait d'une bonne gifle et d'une bonne fessée. Au début, Mark se rebellait un peu. Il lui disait que c'était assez, qu'il ne voulait pas faire tout ça, qu'ils allaient beaucoup trop loin, que ça finirait mal. Mais, petit à petit, devant les menaces de Luis de ne plus revenir et face à ses troublants rappels de la soirée d'initiation le forçant à se souvenir combien il avait joui fortement de lui ce soir là, précisément parce qu'il avait accepté ce qu'il lui faisait, et enfin, la promesse de plaisirs incroyables à venir que Luis disait garder en réserve sans en préciser la nature, tout cela contribua à conduire Mark, selon la mystérieuse parole du Christ à Saint Pierre, «là où il ne voulait pas aller », c'est-à-dire à Rome et au supplice. Luis acheta, voire fit payer par Mark, une raquette de tennis sur table dont il enleva la membrane de caoutchouc et enduit la planchette d'un vernis luisant pour la rendre plus cuisante quand elle s'abattrait sur les fesses de Mark. Il lui fit payer aussi des chandelles à la cire molle pour en faire dégoutter les perles incandescentes sur le scrotum de son partenaire afin de «bien le réchauffer pour la jouissance» lui disait-il. Il arriva même un jour avec deux camarades encore plus jeunes que lui, 13 ans environ, qu'il avait fait assoir sur le canapé du salon et, après avoir « réchauffer» le scrotum de Mark à la cire chaude et lui avoir bien rougi les fesses de sa raquette de tennis sur table modifiée, l'avait obligé à se branler devant cette assistance de jeunes nouvellement pubères et lui avait intimé l'ordre ensuite de bouffer son sperme pendant que lui, Luis, lui montrait son cul et sa bite. Il voulait prouver à ses camarades plus jeunes, sur lesquels il devait sans doute exercer une sorte de tyrannie, que Mark était un adulte entièrement voué à l'adoration de son corps et à l'obéissance à sa volonté. Quand Mark voulut vraiment s'arrêter, car il craignait le pire à voir défiler chez lui tous ces jeunes garçons en plus des réguliers jeunes hommes qui se présentaient chaque jour à sa porte, Luis le menaça de tout raconter à ses parents et de le dénoncer à la police. « Tu m'appartiens, finit-il par dire. Tu es à moi. Tu feras ce que je te commande de faire. » Puis, comme pour l'amadouer ou atténuer la violence de ses propos, Luis ajoutait : « Tu aimes ça au fond de toi. Tu jouis devant mon cul en criant comme un cochon qu'on égorge. Tes yeux m'en redemandent et tu dis vouloir arrêter de jouer avec moi? » Et cochon, c'est Luis qui le devenait de plus en plus par les activités qu'il mettait en place pour faire jouir Mark. Et ce dernier le devenait aussi de plus en plus en s'y soumettant graduellement. Luis se présentait chez Mark de plus en plus négligé. Il ne se lavait presque plus. Il obligeait Mark à s'allonger sur son lit. Il se plaçait debout sur le lit, les talons sous les aisselles de Mark, portant sa casquette de cuir sur la tête et un fouet dans la main, et il descendait très lentement sur sa figure en écartant bien ses fesses pour venir faire atterrir son cul sur la figure de Mark. Il faisait ensuite des mouvements de va et vient dans le sens de sa craque pour bien imbiber la figure de Mark de ses traces. Et des traces, il s'était arrangé pour qu'il y en ait. Il se retournait de temps en temps pour contempler le résultat de ses calculs. Lorsqu'il percevait clairement des traces de son œuvre sur les lèvres, le nez ou les joues de sa victime, il était gris de satisfaction. Alors, il s'adonnait à lécher la face de Mark. Il reniflait ainsi, visiblement si je puis dire, sa propre puanteur et dégustait sa propre saleté intime. C'étaient ces gestes imprévisibles de l'adolescent en proie à une sexualité débordante et folle, qui s'auto-adore et se love sur le corps de l'autre, qui rendaient Mark complètement dingue et le réconfortaient dans sa déchéance. Il avait conscience de vivre des moments qu'il ne revivrait jamais plus. Chaque visite de Luis était un événement unique même si certains gestes se renouvelaient. Luis ajoutait toujours une épice nouvelle faite d'un petit geste, d'une parole, d'une nuance dans la pose, d'un regard en coin, d'un pied qui se retrouve dans une nouvelle position et qui exige ainsi qu'on s'en occupe. Bref, il ajoutait toujours une épice nouvelle qui rendait chaque rencontre unique, exclusive et troublante au point de remettre en cause toute raison d'être hormis la soumission totale à son dieu. Il se sentait comme Pâris provoquant la guerre de Troie plutôt que de laisser passer son désir obstiné pour la belle Hélène dont les charmes, et c'était vrai pour Pâris comme pour Mark aux prises avec le beau Luis, étaient orchestrés, contrôlés et amplifiés par la déesse Aphrodite elle-même. Il se sentait possédé par un dieu, au mieux par un démon. Une autre fois, après l'avoir « attendri » avec la raquette, il lui fit lécher l'intérieur de son propre sous-vêtement. Il se masturba dedans par la suite et obligea Mark à faire de même. Il pissa un peu dessus par la suite, le laissa sécher pendant qu'il menait d'autres jeux et commanda ensuite à Mark de le porter, nuit et jour, tant qu'il ne lui dirait pas de l'enlever. Il lui interdit aussi de se laver et enleva même les robinets de douche qu'il emporta avec lui. Luis venait à toute heure du jour, et même dans la nuit, vérifier si Mark puait de plus en plus. À chaque visite de contrôle, il ajoutait dans le sous-vêtement un peu plus de sperme ou d'urine. Il s'en servit même une fois pour se nettoyer la craque de cul. Mark ne sortait plus tant il avait honte. Ce sont les camarades portoricains qui lui apportaient la bouffe. La majorité cessa même de venir tant l'hygiène de Mark était devenue insupportable. Quelques uns savaient et se taisaient. Certains tentèrent de temporiser Luis pour lui venir en aide sachant que Mark n'avait plus aucun contrôle sur lui-même. Il était devenu la chose de Luis. Il faisait pitié. Sous la pression de ses camarades portoricains, Luis rapporta les robinets de douche mais ce soir là il se promit une soirée de gloire. Il fit allonger Mark dans la baignoire avec son slip blanc, désormais gris, jaune, et par endroits rouillé et brunâtre, crouté aussi de traces de blancs caillés. Il l'obligea à pisser dans son slip et ajouta sa propre miction à celle de sa victime. Puis, il lui ordonna de retirer le slip et de le tordre dans sa bouche. Enfin, il dut le sucer jusqu'à enlever presque toute trace. Finalement, Mark, la bouche pleine de sécrétions à l'allure douteuses, s'étonna de voir Luis se pencher sur lui et venir l'embrasser, la bouche toute grande et la langue enfoncée presque dans sa gorge. Encore une fois, Luis se goûtait sur l'autre et dans l'autre. C'était de lui-même dont il était amoureux mais il avait besoin de Mark pour se faire plaisir. C'était un onanisme extrêmement pervers que ce jeune garçon avait développé, sans doute à cause des habitudes sexuelles trop précoces auxquelles il avait été initié par ses copains portoricains. Mais c'était cela même qui liait Mark. Il revivait à-travers Luis, avec une intensité de turbine électrique, les souvenirs des rêves lubriques et brûlants de sa propre adolescence. C'est seulement après cette scène finale, très dégradante pour Mark mais en même temps salvatrice, que Luis l'autorisa à prendre une douche. Juan arrivant par hasard chez Mark un après-midi où Luis était là pour tourmenter Mark, il trouva ce dernier en larmes, les fesses rouge sang et couvertes de souillures. Il constata alors l'ampleur des dégâts physiques et moraux dans lesquels Mark s'était enfoncé. Juan décida de prendre la situation en charge et chassa Luis, lui interdisant de revenir et le menaçant des représailles du groupe s'il revenait. Malgré l'intervention de ce sauveur providentiel, Mark était rendu si bas qu'au lieu de remercier Juan, il l'invectivait d'injures, le sommant de se mêler de ses affaires, de sortir de chez lui, tout cela sous le regard amusé, triomphant et glorieux de Luis. Mais Juan ne céda pas. Il sortit le garçon à coups de pieds au cul, força Mark à venir chez lui pour la nuit et le lendemain lui fit voir un travailleur social qui était bien connu des milieux portoricains et particulièrement compréhensif et discret. Mark fut logé temporairement dans une maison de transition où des psychologues lui apportèrent une aide précieuse et urgente. Il essaya même de s'enfuir pour retrouver Luis. Mais la patience, la bonté, la chaleur humaine, tant des intervenants que de certains camarades du Centre, tout cela vint à bout de la morbidité dans laquelle il s'était abîmé. Le travailleur social qui avait rencontré Mark chez Juan, obtint une ordonnance de placement pour Luis qui se retrouva en Centre également. Il avait grand besoin d'une rééducation, sûrement sexuellement, mais surtout moralement. Cela donna le temps à Mark de se rétablir et de retrouver ses esprits en parcourant le chemin inverse qui l'avait mené jusque là. Il sortit du Centre six mois plus tard et put rentrer chez lui en ayant l'obligation de vivre temporairement avec un camarade du Centre jusqu'à ce que les lieux ne soient plus chargés uniquement de la présence de Luis, mais qu'y aient pris place au contraire des moments de fraternité, de gentillesse, de bonté voire de tendresse. Mark reprit du mieux et renoua ses contacts avec Juan, Ricardo et les autres. Il recommença à fréquenter le Club qui ne recevait plus de jeunes de moins de 18 ans. Mais, il n'avait pas oublié Luis et fantasmait encore sur des garçons de ce genre, d'apparence angélique mais couchant avec de sombres démons. C'est alors que son travailleur social, occupé à des cas nécessitant des interventions plus musclées_ Mark ne représentant plus une urgence_ prit contact avec l'agence pour laquelle je travaillais pour lui assurer un suivi. C'est dans ce contexte que je le vis pour la première fois chez lui et qu'au fil des rencontres, il me mit au parfum de son histoire. Quand j'ai connu toute l'affaire, après avoir rencontré le travailleur social pour savoir ce qu'il pourrait être tenté de me cacher, mais il m'avait vraiment tout dit de l'essentiel, j'ai décidé qu'il fallait le sortir de ce quartier généralement agréable et sympathique pour plusieurs, mais néfaste et empoisonné pour lui. J'avais rencontré un copain, super sympa, chez Uncle Charlie's Downtown qui habitait Central Park West à la hauteur de la 80è Rue. C'était un quartier propre et bien tenu, très résidentiel, même si les résidences étaient de hautes tours à logements. Je lui ai trouvé un appartement dans l'un de ces buildings et j'ai parlé de lui à mon copain pour qu'il l'aide à se refaire un milieu de vie loin de ses petits diables d'Alphabet City. Alphabet City était peuplé d'anges beaucoup plus que de démons. Mais les désirs de Mark agissaient sur lui comme une baguette magique capable de transformer le jeu en passion, les sentiments en liaisons malsaines, le sexe en drogue hallucinante, le partage en orgie et les anges en démons. Il n'était pas le seul responsable bien sûr. Luis aurait pu être un bon garçon et agir tout autrement. Mark réduisait, au sens jésuite du terme, les meilleures intentions à se perdre dans le gouffre de ses fantasmes. Il ne livrait pas clairement ses désirs secrets et morbides. Il en suggérait seulement la présence: c'était pire. Chacun pouvait y ajouter ce qu'il imaginait et la «sauce» devenait «inmangeable» à la longue. Je songeais alors à cette maxime de La Rochefoucault qui, mutatis mutandis, pourrait s'appliquer un peu dans ce cas-ci : « Les vertus se perdent dans l'intérêt comme les fleuves se perdent dans la mer.» Personne, ni les Portoricains, ni Mark, ni même Luis n'était en mesure de savoir tout le dégât moral et psychologique qu'allaient un jour provoquer les premières incursions de Mark dans les salles de divertissements et les lieux de rencontres des jeunes Portoricains d'Alphabet City et de Lower East Side. Chacun ne voulait qu'avoir un peu de plaisir et le sexe n'était-il pas justement l'un de ces plaisirs et non négligeable. La réalité, c'est que le sexe n'est jamais un plaisir tout à fait innocent. Innocents sont ceux qui n'y voient qu'un simple jeu! C'est sans doute une idée semblable qui inspira le brillant roi Henri III d'Angleterre quand il créa un ordre de chevalerie pour protéger l'innocence quand un événement porte soudain à voir mal et à faire mal là où il n'y a en principe que plaisir. Le prétexte de la jarretière avait allumé toutes les suppositions, tous les fantasmes et ouvrait possiblement ainsi la porte à tous les crimes. Le roi en fut immédiatement conscient. Il déclara alors cette phrase qui allait devenir la devise de l'Ordre : « Honni soit qui mal y pense!». Le roi redoutait que le hasard des événements de la vie puisse trop facilement induire à penser mal et à créer ce mal à force d'y penser. Henri III avait saisi toute l'ambigüité de la sexualité humaine et de sa morale aussi, par conséquent. C'est, à la fois, sur cette inquiétante et réconfortante parole royale que je vous laisse analyser vos propres fantasmes. À suivre...Big Apple 19; Nouvelle histoire : Premier épisode : Une ballade à Flatiron ALEXANDRE