Chapitre 61


Conseil


Sire Aldegard eut le bon goût de ne pas retenir Julien et ses compagnons plus de quelques instants lorsqu'il vint se présenter à son retour dans la Maison Première des Bakhtars. Il les fit conduire directement au clos de ses parents.

Les Berthier n'étaient à Aleth que depuis deux jours, mais ils étaient vêtu à la mode du lieu, beaucoup plus agréable sous un tel climat que des vêtements européens ou que la tenue de Dvârinn dans laquelle Julien commençait déjà à transpirer abondamment. Ils portaient donc des abbas blancs bordés d'un fin liseré fuchsia et or signalant à tous leur appartenance à la Maison Impériale. De légères subtilités de coupe et de drapé faisaient que ce simple vêtement transformait Isabelle en une sorte de reine antique qui n'avait plus grand chose de la robuste fille issue d'une longue lignée de paysans Normands. Elle avait conservé sa figure avenante et ce teint clair qui évoque irrésistiblement la crème fraîche, la pâtisserie et la rosée du matin, mais ses cheveux auburn relevés en chignon à la mode d'Aleth soulignaient un port de tête d'une inconsciente noblesse qui complétaient un personnage d'une grande dignité. Son époux, pour sa part, portait avec une mâle désinvolture ce qu'il aurait certainement qualifié, en d'autres lieux, de tenue de carnaval. Un Passeur se tenait auprès d'eux, son pelage jaune canari jurant affreusement avec tout ce qu'il approchait dans ce décor tout en tons pastel.

Après les premières effusions des retrouvailles, Ugo causa un choc lorsqu'il répondit d'une voix étonnamment distinguée à son ancien maître qui avait eu l'étourderie de lui demander :

Alors, mon vieux, tu as apprécié le voyage ? On dirait que Julien a fait des frais. Tu as un magnifique collier. On dirait de l'or blanc. Isabelle va être jalouse !

Elle peut ! C'est une pièce absolument unique. Il n'y en a pas d'autre dans tout le R'hinz. Cela lui siérait sans doute à merveille, mais je crains de ne pouvoir m'en passer pour le moment.

Ugo ! Tu parles !

J'ai toujours parlé dans ma tête. Maintenant, tu peux m'entendre.

J'en suis vraiment heureux. Où as-tu trouvé cette merveille ?

C'est un ami de Julien qui m'en a fait cadeau.

C'est impressionnant. On dirait qu'il a des amis précieux.

Je ne voudrais pas ternir ton euphorie, mais il semble qu'il ait aussi des ennemis puissants.

C'est vrai. J'ai du mal à m'y faire.

La voix d'Isabelle, qui jusqu'alors discutait à mi-voix avec son fils retrouvé, s'éleva d'un ton et prit un accent un peu plus solennel :

Julien, je voudrais te présenter l'Honorable Wakhann qui a eu la bonté de nous servir d'intermédiaire et brûle du désir de te rencontrer.

Le Passeur jaune s'approcha d'un pas hésitant et inclina la tête afin que Julien pose sa main sur sa nuque.

Puisse Votre Seigneurie accepter les vœux sans importance d'un Passeur.

Honorable Wakhann vous accomplissez une tâche difficile. Vous rendez à ma famille un immense service. Je vous serais vraiment reconnaissant si vous pouviez faire un effort supplémentaire et m'éviter d'avoir à employer le Haut-parler. Je crois aussi que si vous pouviez m'appeler Julien ou, à la rigueur, Sire, comme le fait votre Honorable Maître Aïn, je me sentirais plus à l'aise.

Qu'il en soit selon votre volonté, Sire. De toute façon, maintenant que l'Honorable Maître Yol est de retour, je pense que mes modestes services ne seront plus requis.

Détrompez-vous. L'Honorable Yol risque d'être fort occupé à d'autres tâches et je suis certain qu'il insistera pour que vous poursuiviez votre tâche auprès de mes parents. Si tant est, bien sûr, que vous en ayez toujours le désir.

C'est mon vœu le plus cher, Sire. Et en dehors du privilège rare de connaître ainsi ceux qui vous sont proches, j'apprécie aussi au plus haut point l'occasion qui m'est donnée d'étudier une culture totalement étrangère aux Neuf Mondes.

Je suis heureux que ça vous plaise. Une dernière chose : j'interdis absolument toute manipulation de leur esprit. Par exemple, je ne veux pas qu'on se permette d'altérer leur mémoire pour qu'ils ne gardent aucun souvenir précis des Passeurs qu'ils pourront rencontrer. Je veux qu'ils soient traités exactement comme moi. Parlez-en avec vos Maîtres si vous voulez, mais je ne pense pas que ça posera le moindre problème.

Je ne le pense pas non plus Sire. Maître Aïn m'a déjà fait la même recommandation.


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Sire Aldegard tenait conseil. Un conseil fort restreint d'ailleurs, réduit à six personnes : lui même, Julien et Xarax, Tannder, Aïn et Yol/Ugo. Il s'agissait de décider de la conduite à tenir lors des prochains jours qui risquaient de s'avérer décisifs pour Dvârinn. Tannder était présent à la requête expresse de Julien qui tenait beaucoup à connaître son point de vue d'homme dégagé de toute attache politique.

Demain, Sire, commença Aldegard, auront lieu les funérailles de Sire Ylavan. Vous pouvez choisir d'y paraître ou de vous en abstenir. Ensuite, dans un délai qui ne devrait pas excéder vingt jours, aura lieu l'adoubement du nouveau Miroir de l'Empereur sur Dvârinn. Normalement, votre présence est requise pour cette occasion. Vous pouvez bien sûr décider de vous y soustraire, mais ce serait accréditer les rumeurs qui recommencent à courir sur l'affaiblissement du pouvoir de l'Empereur.

Qu'est-ce que vous conseillez de faire ?

Il n'est pas indispensable de vous montrer demain sur Dvârinn. Je m'y rendrai et présenterai vos condoléances officielles. Nous aurons ensuite une vingtaine de jours pour réunir le Conseil des Miroirs et régler la question de l'adoubement d'un nouveau Miroir sur Dvârinn.

Je pense, fit remarquer Julien, que vous serez d'accord pour penser que Nandak ne peut pas être désigné comme Miroir. Il y a de fortes chances qu'il ait assassiné son père. Il ne devrait même pas être Premier Sire des Ksantiris.

Si la chose a bien eu lieu, elle ne peut certainement pas être prouvée, Sire. Nandak est peut-être malfaisant, mais ce n'est pas un imbécile.

Je me le demande ! Cette histoire de dépôt d'armes interdites est une belle idiotie, non ? Il ne s'imagine quand même pas que les autres vont le laisser utiliser des canons ou je ne sais trop quoi sans rien dire ?

Si cette histoire est vraie, c'est que quelqu'un l'a persuadé que vous n'étiez plus dans le R'hinz. Si c'était le cas, il pourrait conquérir la planète sans que quiconque puisse l'en empêcher. Encore faut-il avoir la preuve qu'il a vraiment découvert ces armes. De toute façon, Sire, vous ne pouvez intervenir dans la succession des Ksantiris.

Non. Mais on doit pouvoir mettre fin à ce genre de projet avant que les choses ne deviennent dramatiques. Déjà, si l'Empereur montre qu'il est toujours là, ça refroidira peut-être ses ardeurs ?

Certainement, mais il peut choisir de vous défier. Cela s'est déjà produit.”

Et qu'est-ce qui s'est passé ?

Aucun de ceux qui l'on fait n'a pu mettre sa menace à exécution. Quant à ceux qui ont été assez malins pour se taire et entreprendre effectivement d'aller à l'encontre des lois du R'hinz, le Conseil des Miroirs a déclaré leurs Maisons éteintes et leurs Marques, abolies. C'est ce qui est arrivé à la Noble Famille des T'ang Ser qui gouvernait la cité de Tchenn Ril que vous avez eu l'occasion de parcourir.

Je préférerais qu'on n'en arrive pas là. Naturellement, cet affaire me cause du souci et j'y ai déjà beaucoup réfléchi. Je pense avoir trouvé une façon de faire qui nous permettra d'éviter de causer plus de dégâts que nécessaire.


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De retour dans son clos, celui qu'il avait partagé avec Niil et Ambar au temps heureux où ils étaient réunis, Julien se tourna vers Tannder.

Tannder, vous n'avez rien dit, au Conseil. Qu'est-ce que vous pensez de mon idée ?

J'aurais tendance à dire, comme le Premier Sire, que c'est un peu téméraire. Mais je crois que vous n'avez pas tout révélé et j'attends de savoir ce que vous avez caché pour juger de votre stratégie, si c'est bien ce que vous attendez de moi.

Julien expliqua alors ce qu'il avait vraiment en tête et reçut alors l'approbation de Tannder ainsi que quelques conseils supplémentaires pour améliorer l'efficacité de son plan. Puis il fit prier Maître Subadar, le disciple d'une autre vie, maintenant Grand Maître du Cercle des Arts Majeurs, de bien vouloir partager son dîner. Celui qui lui avait rappelé l'existence de la Chambre-Ailleurs devait pouvoir l'aider à régler certains détails.


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Chapitre 62


Petite conversation privée


Le Trankenn Premier des Ksantiris résonnait du battement sourd des tambours funèbres. Le soleil froid de la fin de l'hiver inondait de sa lumière pâle la foule rassemblée sur le pont supérieur, sous les voiles impeccablement ferlées du vaisseau immobile. À quelques encablures à tribord se tenait, pareillement impeccable, le Trankenn des Gyalmangs où résonnaient aussi les tambours de mort. La dépouille de Sire Ylavan reposait à la proue de son navire dans un coracle de cuir et de bois tressé, exacte réplique des embarcations utilisées par ses ancêtres des millénaires auparavant. Des fleurs et des copeaux de bois aromatique dissimulaient le corps nu à l'exception du visage recouvert d'une mince feuille d'or martelée à son image. Dame Axelia se tenait près de l'embarcation, vêtue des vêtements de toile grise des pêcheurs de jadis, prête à commander les six marins qui feraient descendre Sire Ylavan jusqu'à la mer pour son ultime voyage. Elle s'apprêtait a donner l'ordre rituel qui les ferait manœuvrer le système de palans permettant d'abaisser doucement le coracle jusqu'aux flots, trente mètres plus bas, lorsqu'un murmure confus s'éleva de la foule. Derrière elle, venait d'apparaître la mince silhouette d'un jeune garçon, vêtu seulement du réseau immédiatement reconnaissable des Marques blanches de la Maison Impériale. Sa voix s'éleva, clairement audible par tous, d'un bout à l'autre du vaisseau :

Noble Dame Axelia, avant d'envoyer votre Noble Époux naviguer sur les Eaux Insondables, permettez à Yulmir de saluer une dernière fois son Miroir.

Malgré sa surprise et ses vêtements grossiers, Dame Axelia s'inclina avec une dignité pleine de grâce et s'écarta pour laisser passer le visiteur inattendu qui s'avança jusqu'à la barque funéraire et contempla un instant le masque d'or avant de revenir vers la veuve.

Nul, Noble Dame, n'est plus digne de garder son peuple des périls de la mer. Nul n'est plus digne de guider les siens sur les Courants du Destin. Nul n'est plus digne d'inspirer de sa Sagesse les gardiens de sa Lignée.

Les paroles rituelles ayant été prononcées, Dame Axelia fit un signe de la main, les six hommes entonnèrent une archaïque chanson à hisser et s'employèrent à faire descendre doucement leur Maître mort. Au moment où l'esquif flotta librement, un long coup de sifflet déclencha le déploiement de la voilure des deux grands navires qui s'écartèrent d'abord lentement, puis de plus en plus rapidement.


À bord du Trankenn Premier, le silence était absolu, souligné encore par le souffle régulier du vent dans le gréement. Les bras croisés, résolument campé sur ses pieds à la proue du navire, Julien contemplait la foule des visages tournés vers lui. La première phase du plan soigneusement mis en place s'était déroulée à la perfection. Malgré la température extrêmement fraîche, il n'avait pas froid, protégé qu'il était pour un bon moment encore par un onguent particulièrement efficace. Il eût été en effet dommage de prononcer son discours en claquant des dents. Il n'éprouvait pas non plus la moindre gêne à se montrer ainsi, nu devant la foule. Le vieux Maître des Traditions avait raison : ''Les Marques sont le seul vêtement indispensable aux Nobles Fils''. Mais il devait maintenant poursuivre.

Les Nobles Sires Ksantiris n'accueilleront-ils pas le Gardien des Neuf Mondes ?

Tous les visages se tournèrent aussitôt vers l'estrade où siégeaient Nandak, Nekal, Niil et Ambar. Si Nandak, Niil et Ambar étaient manifestement décontenancés, le visage de Nekal reflétait une horreur sans nom et, alors que les autres se levaient en essayant de garder une certaine dignité, il dut se rasseoir, le visage gris, ses jambes lui refusant momentanément tout service. Son frère se tourna vers lui et le saisit brutalement par le bras pour le remettre sur ses pieds. Il ne comprenait pas la raison de cette scène, mais il ne pouvait tolérer qu'un Ksantiri se couvre ainsi publiquement de honte.

Nandak, laissez à votre Noble Frère le temps de se remettre de la joie de revoir son Empereur. La Tradition affirme que ''l'Empereur est partout chez lui dans les Neuf Mondes'', mais peut-être aurais-je dû annoncer ma visite et lui épargner une émotion trop violente.

Nandak avait rapidement franchi la distance qui le séparait de Julien et se tenait devant lui, un genou en terre, la nuque courbée dans l'attitude traditionnelle de demande d'indulgence :

Que Votre Seigneurie daigne oublier ce disgracieux incident. Qu'elle accepte, avec mes plus fervents souhaits de bienvenue, l'expression sincère de ma profonde gratitude pour l'honneur ainsi fait à la mémoire de mon Noble et regretté Père.

Cet incident n'a pas eu lieu, Nandak. Quant à votre très regretté Père, mon fidèle Miroir, il m'aura au moins laissé, en plus du souvenir de sa fidélité, son Noble Fils Niil, un Conseiller précieux malgré son peu d'années.”

Puis, élevant la voix, il appela par-dessus la tête de Nandak toujours agenouillé.

Sire Niil, ne me donnerez-vous pas de quoi couvrir mon corps ? Ou les Ksantiris auraient-ils soudain perdu leurs bonnes manières ?

Niil accourut aussitôt, se dépouilla entièrement et présenta ses vêtements un à un. Il aida Julien à les revêtir et ajuster le hatik de cérémonie comme il convenait, accomplissant ainsi publiquement sa part de l'ancien rite par lequel le suzerain investissait son vassal de sa confiance la plus absolue, signifiant qu'il était aussi près de lui que ses propres vêtements et que tenter de lui nuire équivalait à déclarer la guerre à l'Empereur lui-même. Ayant ainsi fait passer publiquement un message qui ne tarderait pas à résonner dans tout le R'hinz, Julien envoya bien vite son ami se couvrir avant qu'il ne se mettre à trembler de façon trop visible et suivit Nandak vers les salons d'honneur du navire où se tenait la fine fleur de l'aristocratie Dvârienne. Il s'était assuré d'un coup d'œil que Dame Axelia prenait en charge un Ambar complètement perdu à qui il avait tout-de-même eu le temps d'adresser un sourire qui se voulait rassurant.

Julien dut subir les hommages respectueux d'un nombre impressionnant de personnages tous très conscients de leur importance avant de pouvoir passer avec Nandak dans un salon un peu moins vaste où l'attendaient, outre Sire Aldegard et Dame Délia, Dame Axelia et Ambar ainsi que Niil, de nouveau vêtu pour la circonstance. Une quinzaine de grands personnages, parmi lesquels le Noble Sire Délian, allié putatif du futur Maître du Monde, attendaient aussi en bavardant autour d'une longue table dressée pour un banquet. Mais comme on le conduisait vers la place d'honneur, Julien remarqua :

Nekal serait-il souffrant ? Ou la vision de ma personne lui aurait-elle coupé l'appétit ?

Visiblement, Nandak n'en savait rien car aucune explication à cette absence qui constituait un manquement flagrant à l'étiquette ne lui venait à l'esprit. Comme il allait se lancer à nouveau dans des excuses, Julien l'arrêta d'un geste.

Je vous en prie. Votre frère est en âge de répondre lui-même de ses actes, et je ne doute pas qu'il y ait, derrière cette apparente discourtoisie, une raison toute simple et innocente. Mais, si vous vous inquiétez de la santé de ce cher Nekal, mon Conseiller privé pourrait tenter d'en savoir plus.” Ce qui, traduit du langage diplomatique, voulait dire : “Quelque chose est pourri dans le Domaine des Ksantiris et votre frère ne se gêne pas pour me cracher à la figure. Tirez ça au clair immédiatement ou je vais m'en charger moi-même !”

Ce ne sera pas nécessaire, Votre Seigneurie, je vais l'envoyer quérir.

Comme vous voudrez. Mais comme il serait impoli de commencer le repas alors qu'on attend encore un convive, peu-être me ferez-vous la grâce d'un entretien privé ? Je crois qu'il y a par ici un petit salon qui conviendrait à merveille. Aldegard, auriez-vous la bonté de vous joindre à nous ?

Nandak se détendit visiblement. Un entretien avec l'Empereur et Aldegard ne pouvait que concerner sa future charge de Miroir. Il était heureux de quitter le terrain glissant du comportement outrageusement choquant de son crétin de frère. Ils se rendirent donc, après s'en être excusés auprès des autres invités, dans le salon en question où ils prirent place dans des sièges confortables autour d'une table convenablement garnie de rafraîchissements.

Si vous le permettez, commença Julien, j'aimerais vous présenter quelqu'un. Xarax !

Le haptir parut se matérialiser sur l'accoudoir du fauteuil de Nandak qui esquissa un mouvement vers la ceinture de son hatik.

Si j'étais à votre place, l'avertit Julien, je ne bougerais plus. Plus du tout. Xarax est aussi un de mes Conseillers privés, mais il est beaucoup plus dangereux que les autres. Si vous évitez soigneusement tout mouvement inconsidéré, vous allez avoir le privilège d'un entretien particulier avec le Haptir de l'Empereur. Il va vous faire voir une conversation des plus instructives entre Sire Délian et son Maître d'armes.

Xarax posa sa patte sur le bras d'un Nandak tétanisé. Il la retira après quelques secondes et, comme Nandak prenait une inspiration pour protester, Julien l'arrêta d'une voix parfaitement calme :

Je vous recommande instamment de ne pas essayer de nier l'évidence. Sire Aldegard est ici en tant que représentant officiel du Conseil des Miroirs et vous n'ignorez pas les pouvoirs de ce Conseil. À compter de cet instant, chacune de vos paroles sera conservée fidèlement comme l'a été la scène que vous venez de voir et ces paroles auront des conséquences immédiates pour vous et votre Famille. Est-ce bien clair ?

Nandak hocha la tête.

Bien. Sire Aldegard va vous suggérer une ligne d'action qui a toute mon approbation. J'espère qu'elle aura aussi la vôtre.

Noble Sire, commença Aldegard, il semble que vous vous soyez rendu coupable de complot contre la sécurité générale des Neuf Mondes. Vous connaissez le châtiment qui punit une telle forfaiture. Le Conseil des Miroirs vous offre une chance de réduire la rigueur de ce châtiment. Vous pouvez, en signe de contrition et dans le but d'aider à préserver la paix du R'hinz, guider de votre propre initiative les Gardiens du Conseil vers les armes en question et tout autre dépôt illégal dont vous auriez connaissance. Vous pouvez vous soumettre de bonne grâce à certains changements dans l'administration de vos domaines, l'un de ces changement concernant spécifiquement le Domaine de Ksantir. Au cas où une telle décision vous surprendrait, sachez que votre Honorable Frère a poussé la bêtise jusqu'à refuser grossièrement d'accéder à une requête faite expressément au nom de l'Empereur, signifiant par là qu'il ne croyait pas que l'influence de Yulmir pût protéger Ses Messagers. D'autre part, la haine qu'il semble avoir suscitée au sein d'un peuple qu'il est censé protéger a persuadé le Conseil que la gestion d'un îlot dépeuplé conviendrait mieux à ses talents. Vous pouvez accepter la supervision discrète d'un Conseiller privé nommé par le Conseil des Miroirs. Vous pouvez enfin renoncer à la charge trop lourde de Miroir de l'Empereur dont, après votre regretté père, vous vous sentez profondément indigne. Ceci dit, vous êtes libre de choisir une autre ligne de conduite et vouloir, par exemple, contester la véracité de l'accusation qui pèse sur vous. Sachez qu'alors l'enquête approfondie qui s'ensuivra révélera toute la vérité, bonne ou mauvaise. Et n'espérez pas que quoi que ce soit demeure caché. Le crime est tel que les moyens d'investigation les plus extrêmes sont légitimes. Vous savez certainement qu'il existe des techniques de sondage mental fort efficaces, même s'il est interdit d'y avoir recours pour les crimes ordinaire en raison des dommages qu'elles sont susceptibles de causer à des esprits manquant de résistance. Cependant, quelqu'un qui serait absolument certain de sa totale innocence ne risquerait bien sûr rien à choisir cette voie... J'attends votre réponse.”

J'accepte.”

Au moins, vous faites preuve aujourd'hui d'un bon sens qui vous a manqué lorsque vous vous êtes lancé dans cette folie.”

Puisque vous êtes d'accord, dit Julien pour conclure l'entretien, je ne vois pas de raison pour faire attendre plus longtemps vos hôtes.”


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Le repas fut étrange. Le noble Sire Nandak semblait perdu dans ses pensées. Sans doute sa profonde affliction était-elle responsable de son manque de conversation. Quant à Sire Nekal, il avait dû manger quelque chose de pas véritablement frais au petit déjeuner car il n'avalait pratiquement rien. Pour quelqu'un de célèbre pour son appétit dans tous les domaines, c'était presque inquiétant. Sûrement, son cuisinier allait en subir les conséquences. L'empereur lui, fut unanimement déclaré charmant. Même si ce qualificatif pouvait paraître un peu léger, appliqué au Maître incontesté de l'Univers Connu, tous s'accordèrent que c'était ce qui décrivait le mieux la nouvelle personnalité sous laquelle Yulmir avait décidé de se présenter. Toutes les Dames présentes, en particulier, auraient rêvé d'un tel fils. Un convive cependant, termina le repas dans un état de trouble qui lui gâcha le reste de sa journée. Sire Délian, en effet, se demandait pourquoi, au nom de toutes les Puissances du R'hinz, l'Empereur avait éprouvé le besoin de lui demander le nom de son Maître d'armes.


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