Chapitre 59


Contact


Avec le retour du beau temps, Xarax avait repris son vol. Il avait même trouvé, assez haut dans l'atmosphère, un courant qui l'avait porté plus ou moins dans la direction qui lui convenait. Il avait parié que l'estime du pilote de Sire Délian était correcte et il avait gagné. C'était une bonne chose car il était exclu qu'il puisse faire demi-tour contre un tel courant. Mais il n'aurait pas à nager. Le Trankenn Premier était là où il avait espéré le trouver. Il plongea vers l'océan, perdant en quelques dizaines de secondes des milliers de mètres d'altitude et redressa sa course au ras des vagues, filant de toute sa vitesse droit vers le gigantesque vaisseau. Il avait pris soin d'ajuster soigneusement sa couleur à celle de l'océan et il aurait fallu une malchance impensable pour que même la plus attentive des vigies pût l'apercevoir.

Il ne lui fallut que quelques minutes pour localiser et rejoindre la confortable suite attribuée à Niil et Ambar. Ils n'étaient sans doute pas en grâce auprès du Seigneur des Ksantiris, et Ambar était considéré comme un intrus, mais ils faisaient partie de la Famille et devaient bénéficier ostensiblement de tous les égards dus à leur rang. Ceci dit, le personnel ne se bousculait pas vraiment pour se disputer l'honneur de les servir et on les laissait le plus souvent seuls, sans se soucier de les distraire ou de les entretenir des dernières nouvelles. Cette situation leur aurait parfaitement convenu si on ne leur avait pas fait discrètement comprendre que leur présence n'était pas souhaitée ailleurs que dans leurs appartements. Ils étaient entrain de jouer aux cartes lorsque le haptir se manifesta par un discret froissement d'ailes. Ambar l'aperçut le premier et son visage s'illumina d'un grand sourire.

Xarax !

Bienvenue sur le trankenn Premier, ajouta Niil, quoique je ne pense pas que mon Noble Frère serait aussi content de vous voir.

Xarax sauta sur son épaule.

Xarax est heureux de vous retrouver, toi et ton jeune frère, Ksantiri. Xarax a des nouvelles, bonnes et moins bonnes, qu'il faut transmettre au Noble Sire Aldegard.

Est-ce que Julien va bien ? Il est revenu ?

Julien va bien, il est actuellement sur Dvârinn.

Où ça ? À Ksantir ?

Non, il est quelque part au sud-est, sur son propre bateau. Mais si tu laisses Xarax te raconter, les choses seront plus simples.

En fait il raconta l'histoire aux deux garçons à la fois. Et il le fit à sa façon, en leur faisant partager sa vision des événements. L'expérience ne dura guère plus de quelques minutes, mais le souvenir d'une incroyable netteté qu'ils en gardèrent paraissait s'étaler sur plusieurs heures. Julien était atterré :

Vous croyez que mon frère a vraiment trouvé des armes interdites ?

Xarax pense que c'est très possible.

Il n'est quand même pas fou au point de vouloir les utiliser !

Après la façon dont Nekal a traité Julien et les soupçons qui entourent le décès de ton Noble Père, Xarax est prêt à croire ta famille capable d'à peu près n'importe quoi. Bien sûr, ce jugement ne s'étend pas à vous deux. Il faut absolument prévenir Sire Aldegard au plus vite.

Je ne peux rien faire, on est pratiquement prisonniers. Ça m'étonnerait qu'on me laisse demander un Passeur.

Xarax a eu le temps de réfléchir, pendant qu'il volait. Sire Aldegard va sûrement venir ici, sur le Trankenn Premier, pour les funérailles de son ami, Sire Ylavan. Nandak ne peut pas ne pas l'inviter. Je suis certain qu'une des premières choses qu'il fera sera de demander à te voir. Il peut utiliser n'importe quel prétexte, mais je pense qu'il choisira d'avoir à te transmettre des instructions privées de l'Empereur. Tu pourras l'informer de ce que tu sais. Ce sera un peu tard, mais au moins il sera prévenu.

Ils furent interrompus par le carillon d'entrée et Xarax s'éclipsa juste avant l'arrivée d'un serviteur portant un plateau couvert que Niil s'apprêtait à renvoyer, puisqu'ils n'avaient rien commandé, lorsqu'Ambar se précipita pour fermer la porte derrière lui.

Karik ! C'est Karik !

En effet, c'était bien le jeune garçon tiré des griffes de l'infâme aubergiste des Trois chopes par Tannder. Karik qui devait servir de messager discret et qui remplissait enfin son office.

Noble Sire, fit-il en s'adressant à Niil, l'Honorable Tannder m'envoie vous dire que votre maître est de nouveau parmi nous, dans le R'hinz. On suppose qu'il est sur Dvârinn, mais il n'a pas encore été possible de le localiser.

Karik, sois le très bienvenu. Dis-nous d'abord comment tu es parvenu jusqu'ici. Et si ton plateau contient quelque chose de comestible, je propose qu'on le partage entre conspirateurs.

Le plateau comportait un assortiment des plus exquises friandises des cuisines de la Maison Première des Bakhtars qu'ils s'empressèrent de faire disparaître tout en échangeant des informations.

C'est un Passeur nommé Wakhann qui m'a amené ici. Il est reparti, et il m'attend pour me ramener près de Maître Tannder. Si vous avez des messages, vous pouvez me les confier. Comme vous voyez, je porte la tenue des serviteurs Ksantiris, ça me permet de circuler sans trop de problèmes tant que je reste discret.

Il faudrait que Wahann vienne ici.

Ça me paraît difficile. S'il vient vers votre clos, on le remarquera sûrement. Et aussi...

Karik s'arrêta avec un curieux coassement de surprise. Xarax venait de se montrer, causant une belle frayeur au malheureux avant qu'il ne se souvienne qu'il s'agissait d'un ami. Le haptir avait quelque chose à dire mais, conscient du trouble qu'il provoquait, il choisit de passer par l'intermédiaire de Niil.

Xarax dit qu'il faudrait demander à un passeur de nous rapporter un petit klirk-cible qu'il pourra déposer sur le navire de Sire Julien. Il ajoute que c'est la première priorité. Tout le reste peut attendre. Je suis d'accord avec lui.


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Chapitre 60


Dernières nouvelles


L'arrivée à l'aube, sur l'Isabelle, d'un Xarax épuisé et complètement décoloré fit sensation. Il tenait entre ses griffes une sorte de grosse pièce de monnaie de ce métal gris que Julien avait appris à associer aux klirks et, lorsqu'il s'en saisit, il fut étonné de la trouver beaucoup plus légère qu'il ne s'y attendait. Il n'avait bien sûr jamais vu de titane, ce métal beaucoup plus dur et résistant à la chaleur que le meilleur acier et qu'on utilisait essentiellement pour la fabrication des moteurs de missiles ou de fusées. Il ne fut par contre pas autrement surpris de constater qu'une de ses faces était gravée d'un klirk dont le motif lui parut plus simple que ceux qu'il avait déjà eu l'occasion de rencontrer.

Content être arrivé. Pensais pas pouvoir. Fixer klirk sur pont.

Tenntchouk et Gradik vont s'en occuper. Toi, tu viens prendre une douche avec moi. Tout-de-suite.

Julien donna le klirk à Tenntchouk, lui expliqua brièvement ce qu'il fallait faire, et descendit dans la douche minuscule où il s'empressa de redonner à Xarax l'énergie du Yel qui commençait à lui faire cruellement défaut. Puis il le porta, profondément endormi, jusqu'à sa couchette où il l'installa confortablement sur son oreiller. Lorsqu'il remonta, les matelots avaient déjà fixé le klirk sur le roof selon ses instructions, et Ugo semblait perdu dans la contemplation de ses entrelacs.

Tu sais ce que c'est, Ugo ?

C'est un klirk-cible. On s'en sert pour marquer un nouveau site d'exploration. Seul le Passeur qui l'a fait peut l'utiliser. Je suppose qu'ils ont choisi ce type de klirk parce que c'était le seul qui soit déjà prêt et que Xarax pouvait transporter facilement. Chaque Passeur en a toujours quelques-uns en réserve. Autrement, il aurait fallu attendre pour en fabriquer un autre dans un modèle aussi petit. De plus, il a l'avantage de ne pas pouvoir être utilisé par n'importe qui. Je ne connais pas toutes les signatures, mais je crois que celui-ci appartient à Aïn. Comment va Xarax ?

Il dort. Il était vraiment à moitié mort. Je me demande comment il est arrivé jusqu'ici. Il n'a pas encore pu me raconter ce qu'il a fait, mais au moins, on est sûrs qu'Aldegard sait que je suis ici. Maintenant, je suppose qu'on n'a plus qu'à attendre qu'Aïn vienne nous rendre visite.

Oui. Je pense que Xarax a dû donner un délai minimum avant l'utilisation. Je ne crois pas qu'il tenait à voir Aïn apparaître au-dessus de l'océan.

Évidemment, même s'ils s'efforçaient d'avoir l'air de n'être pas là, les deux marins ne perdaient pas une miette de la conversation et Julien éleva simplement un peu la voix pour s'adresser à eux.

On va avoir la visite d'un Passeur, c'est pour ça qu'on a fixé cette rondelle de métal sur le roof. Si c'est bien celui que je crois, c'est un ami très cher. Vous n'avez peut-être jamais vu quelqu'un apparaître sur un klirk. C'est curieux, mais il n'y a rien de magique là-dedans. Il n'y a pas de quoi s'effrayer.

Oh ben ça, on sait, le rassura Gradik. Faudrait êt' un sauvage des Nag Ling pour pas savoir ça.

Alors tout est bien. Si tout est paré, je propose qu'on attaque le petit déjeuner.


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Ils eurent le temps de terminer le petit déjeuner, et même le déjeuner avant qu'Aïn ne fasse son apparition sous le regard de tous, moins Xarax qui digérait encore son orgie énergétique. L'effet eût été tout-à-fait impressionnant s'il n'avait été quelque peu gâché par la perfidie d'une vague croisée qui fit faire au bateau un mouvement vicieux et envoya le malheureux rouler à bas du roof de la façon la plus comique. Il faut porter au crédit de l'équipage que personne ne fit mine de sourire ou même de remarquer l'incident. Julien se précipita aussitôt vers le Passeur.

Aïn ! Mon ami ! Vous ne pouvez pas savoir comme je suis heureux de vous revoir. Je vous ai cru mort.

Et s'agenouillant, il serra dans ses bras sans plus de cérémonie celui qui lui avait sauvé la vie.

Sire ! J'ai cru vous avoir perdu. Mais j'ai suivi votre trace jusqu'à ce monde où vous êtes né et...

Aïn, vous me raconterez tout ça dans un moment. Mais d'abord, je voudrais que vous vous occupiez de Yol. Il est profondément honteux d'être prisonnier du corps d'un animal.

Mais il ne faut pas ! C'est un héros parmi les Maîtres Passeurs. Il sera connu à tout jamais comme ''Le Sauveur de Yulmir''.

Eh bien dépêchez-vous de le lui annoncer vous-même avant que la honte ne le pousse à se jeter à l'eau.

Julien ne sut jamais ce qui se dit entre les Passeurs pendant l'heure qu'il restèrent isolés dans le carré, mais toute l'attitude de Yol/Ugo montrait qu'un poids énorme avait été ôté de son esprit. Puis vint le récit des tribulations d'Aïn, que son collègue retrouvé eut l'honneur de traduire en mots pour l'équipage auquel vint se joindre un Xarax positivement coruscant.


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Après les quelques jours qu'il lui avait fallu pour se remettre un peu du choc subi dans le piège du klirk secret, Aïn s'était immédiatement lancé à la recherche de Julien. Il n'était pas absolument certain que celui-ci avait survécu, mais il pensait que les chances étaient suffisantes pour se lancer dans une telle entreprise. Il avait sur son prédécesseur, Yol l'Intrépide, un avantage de poids : il avait participé à un sondage de son esprit. Certes, l'opération avait été un fiasco qui avait bien failli provoquer sa déchéance, mais pour l'heure, elle lui donnait une connaissance intime de celui qu'il recherchait. Comme Yol avant lui, il se mit en quête d'une trace du passage de Julien dans l'En-Dehors. Mais après plusieurs jours de recherches infructueuses et alors qu'il s'apprêtait à céder au découragement, il eut la même idée simple et lumineuse qu'avait eue Xarax avant lui alors qu'il tentait d'aider son ami à sortir du chaos. Il chercha dans ses souvenirs les images qu'il avait perçues dans l'esprit de Julien. Des images intimes et qui le rattachaient à son monde d'origine. Mieux, il se laissa imprégner par la personnalité de Julien au point de ressentir ce qu'il avait ressenti. C'est un exercice dangereux auquel les Passeurs prudents évitent soigneusement de se livrer. Mais Aïn n'avait plus rien à perdre et il s'immergea dans le souvenir des émotions d'un enfant de la Terre et comme pour Julien avant lui, la route lui apparut, évidente et sûre.

Dès qu'il arriva dans la maison, en plein sur le klirk dont les Berthiers croyaient pourtant avoir complètement effacé toute trace, il sut que Julien n'était plus là. La chambre était imprégnée de son odeur, mais sa présence datait de plusieurs jours. Par contre, Maman était bien là et son hurlement résonnait des plus désagréablement aux oreilles délicates du Passeur. Il faut dire à la décharge d'Isabelle Berthier qu'elle venait d'être surprise en pleine crise de mélancolie, assise sur le lit de son enfant disparu et respirant son oreiller dans l'espoir d'y retrouver le souvenir de son odeur. Le grand chien bleu à moitié roussi avec des yeux jaunes avait tout d'une apparition infernale. Tout ce vacarme avait au moins eu le mérite d'attirer son mari qui fit preuve d'une remarquable présence d'esprit en s'interposant immédiatement entre l'intrus et sa femme qui se tut aussitôt. Puis il s'efforça d'évaluer la situation. La bête étrange n'avait pas l'air menaçante. Elle se contentait de se tenir là, immobile, et de le regarder avec ses étranges yeux jaunes. Son poil d'un bleu layette ridicule était roussi sur une bonne moitié de son corps et il avait l'air d'avoir souffert de brûlures dont certaines n'étaient pas encore tout-à-fait guéries. Un chien bleu ? C'est ainsi que Julien avait décrit le Passeur qui lui avait sans doute sauvé la vie.

Aïn ? Vous êtes Aïn ?

Aïn ne parlait pas Français, ni aucune langue terrestre, et il n'avait pas encore suffisamment plongé dans les souvenirs glanés chez Julien pour en tirer les éléments de base du Français. Mais le sens de la question était évident. Il répondit posément de sa drôle de voix inadaptée de Passeur.

Aïn.

Je suis Jacques Berthier.

Pwa-pwa Yu-li-yen.

C'est ça, le papa de Julien. Et voici Isabelle, mon épouse.

Mwa-mwan Yu-li-yen.

Oui, la maman de Julien. C'est lui qui vous envoie ?

Là, Aïn manquait de connaissances. Il fit ce qu'il avait l'intention de faire depuis le début. Il s'approcha de l'homme jusqu'à le toucher presque et baissa la tête pour présenter sa nuque. Jacques Berthier avait eu un gros chien nommé Ugo suffisamment longtemps pour avoir le réflexe de poser la main sur ce cou qui s'offrait. Les Passeurs, comme toutes les espèces télépathes hautement évoluées disposaient d'une sorte de panoplie de communication non verbale de base, indispensable pour entrer en contact avec des espèces dépourvues de langage ou ne pratiquant aucune langue connue du Passeur. C'était un mélange complexe d'images et d'émotions en même temps qu'un modèle extrêmement efficace de relations entre les données mentales. Cet outil, d'une simplicité apparemment enfantine, était en fait l'aboutissement d'une évolution des sciences de la connaissance et de la logique dont la complexité et la technicité n'avaient rien à envier à ce que les civilisation technologiques considéraient comme le domaine de la recherche de pointe. En quelques minutes, il parvint à établir une compréhension suffisante pour les besoins immédiats. Il apprit ainsi l'histoire du bref séjour de Julien chez ses parents et son départ pour Dvârinn. Il reçut aussi de plein fouet la détresse de ces gens qui ne parvenaient pas à comprendre comment ils avaient, sans vraiment protester, laissé leur fils unique s'en aller vers un destin plein de dangers.

Il ne lui fut pas difficile de le découvrir, cependant il s'abstint de leur communiquer ses conclusions. En effet, il était peu probable qu'ils pardonnent aisément une manipulation parfaitement illégale et hautement immorale de leurs émotions par un haptir dont le seul but était la poursuite de sa mission : la restauration de Yulmir dans toute sa puissance. Mais, s'il garda le silence sur ce sujet, il décida, comme une sorte de compensation, d'accéder à leur vœu commun de retrouver leur fils, quels que soient les sacrifices nécessaires. Comme beaucoup de ses collègues, Aïn était un philosophe moral d'une grande subtilité et il s'estimait, en tant que citoyen du R'hinz, en partie responsable du tort qui avait été causé à ces gens. Il pouvait parfaitement comprendre les motivations qui avaient poussé Xarax à enfreindre un code éthique qu'il s'efforçait, lui, de respecter scrupuleusement, mais il était bien décidé à tout tenter pour atténuer les conséquences de ce manquement. C'est pourquoi, après avoir passé deux jours à se préparer et laissé ainsi aux Berthiers le temps de parer au plus urgent, il les avait tout bonnement ramenés avec lui sur Nüngen où ils jouissaient pour l'instant de l'hospitalité de Sire Aldegard. Il bénéficiaient aussi des services d'un Passeur novice chargé de leur servir d'interprète et, dans toute la mesure du possible, de leur faciliter l'apprentissage du tünnkeh.

Mes parents sont à Aleth ?!

Oui Julien (Ugo avait jugé opportun de ne pas traduire le ''Sire'' employé par Aïn), et ils m'ont demandé de vous embrasser de leur part. Quoique je ne voie pas très bien comment m'acquitter de cette agréable commission...

Aïn avait passé sous silence ce qu'il avait découvert des procédés du haptir, mais il avait bien l'intention d'en informer Julien directement, dès la fin de la réunion.

Eh bien je suppose que vous allez pouvoir me ramener là-bas dès que j'aurai réglé quelques questions ici.

Il se tourna alors vers les deux marins qui le regardaient bouche bée :

Tenntchouk, est-ce qu'il nous reste beaucoup d'argent ?

Ben... Maître Anhel, après qu'on a eu tout payé, y restait encore un peu plus de trente sertchen, je vais aller vous les chercher tout-de-suite.

Julien soupira. Il commençait à bien connaître les symptômes qui s'emparaient de son compagnon.

Tenntchouk, je n'ai pas changé. Je suis toujours le même et je ne veux pas que ça change. Si vous m'appelez encore Maître Anhel, je vais croire que vous ne m'aimez plus. Continuez à me tutoyer, s'il vous plaît, par contre, si vous y tenez, vous pouvez m'appeler Julien. C'est mon vrai nom et ce sera plus simple pour tout le monde. Mais ''gamin'', ça n'est pas mal non plus. D'accord ?

D'accord, gamin. Mais si on avait su que t'étais quelqu'un d'aussi...

Oui, eh bien, c'est mieux comme ça.

Bon, je vais chercher ton or.

Ça n'est pas la peine. Je veux simplement savoir si vous aurez assez d'argent pour entretenir le bateau pendant un moment. C'est votre bateau, cet Honorable Passeur en est témoin. Naturellement, j'aimerais bien pouvoir venir naviguer avec vous de temps en temps, comme invité.

Ben, y manquerait plus qu'ça ! C'est déjà suffisamment triste que tu t'en ailles.

Merci. Alors on laissera le klirk sur le roof et Aïn pourra me ramener quand j'aurai un peu de temps libre. Comme je n'ai pas envie de naviguer sur un rafiot bon pour la casse, vous aurez un compte ouvert quelque part où ça vous conviendra. Si Kardenang vous convient comme port d'attache, je suis sûr qu'on pourra s'arranger avec Maîtresse Nardik pour que vous ayez un clos à votre disposition toute l'année. Mais si vous voulez prendre d'autre dispositions, ça vous regarde. Vous pouvez peut-être aussi prendre quelqu'un pour vous aider, mais il vaudrait mieux qu'il ne soit pas bavard.

Ça, on l'a bien compris. On est pas complètement idiots.

Non, et c'est bien pour ça que j'aimerais tant pouvoir compter sur vous.

Tu peux, gamin. Où c'est qu'y faut qu'on signe ?

Il n'y a rien à signer. J'ai votre parole. Vous avez la mienne. C'est tout. Maintenant, il faut que je me prépare à partir. Dans un jour ou deux, Aïn reviendra avec quelqu'un pour régler tous les détails. Une dernière chose, quand je vous ai parlé d'acheter un bateau, vous m'avez dit que vous ne connaissiez pas la navigation, mais je n'ai pas l'impression que vous ayez eu des difficultés jusqu'à présent.

Ben, ç'quon a fait, c'était pas vraiment naviguer, on est restés dans l'archipel, pratiquement. Mais si tu veux faire le tour du monde, faudra qu'on étudie un peu ou qu'tu nous donnes un pilote.

Je vois.


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